On parle toujours de « surcharge progressive » pour dire qu’il faut se renforcer progressivement.
Mais si on rentre dans les détails, à quoi correspond la surcharge progressive en kinésithérapie ?
La surcharge progressive en kinésithérapie
La surcharge progressive est une technique utilisée en kinésithérapie pour aider à réadapter les muscles et les tissus après une blessure ou une intervention chirurgicale. Cette technique consiste à augmenter progressivement la charge ou la résistance de l’exercice pour stimuler le développement musculaire et améliorer la force, l’endurance et la flexibilité.
La surcharge progressive peut être utilisée pour traiter une grande variété de pathologies, notamment les blessures chez les sportifs, les troubles musculo-squelettiques, la rééducation postopératoire et les pathologies rhumatologiques. Les exercices peuvent être effectués avec des poids, des élastiques de résistance variables, des machines ou simplement avec le poids de corps.
Il est important de noter que la surcharge progressive doit être effectuée avec prudence et sous la supervision d’un professionnel de la santé qualifié. Les exercices doivent être adaptés aux besoins individuels de chaque patient, en fonction de leur niveau de condition physique et de leur état de santé général.
Quelles sont les bonnes pratiques pour optimiser la surcharge progressive lors de la rééducation ?
Voici quelques « guidelines » des bonnes pratiques à suivre pour optimiser la surcharge progressive lors de la rééducation en kinésithérapie :
Établir des objectifs réalistes :
Avant de commencer la rééducation, il est important d’établir des objectifs clairs et réalistes en collaboration avec le patient et en tenant compte de son état de santé général.
Commencer lentement :
Il est essentiel de commencer avec des exercices de faible intensité et de progresser lentement au fil du temps pour éviter les blessures et favoriser une guérison progressive.
Adapter les exercices :
Les exercices doivent être adaptés aux besoins individuels de chaque patient en fonction de son niveau de condition physique et de ses objectifs de rééducation.
Surveiller la douleur :
Il est important de surveiller la douleur pendant les exercices et de cesser immédiatement si elle devient excessive.
Varier les exercices… ou pas :
Pour éviter la stagnation, il est important de varier les exercices en modifiant la résistance, le nombre de répétitions, les angles et les mouvements. Mais sans forcément changer l’exercice en lui même. Si on veut progresser du squat… il faut faire du squat ! Et cela, assez longtemps.
Donner suffisamment de temps de repos :
Il est essentiel de donner suffisamment de temps de repos entre les séances d’exercices pour permettre au corps de récupérer et de se réparer.
Suivre la progression :
Il est important de suivre la progression de chaque patient en enregistrant les résultats et en ajustant les exercices en conséquence.
En suivant ces bonnes pratiques, la surcharge progressive peut être un outil efficace pour aider les patients à récupérer et à retrouver leur fonctionnalité après une blessure ou une intervention chirurgicale.
Que dit la science au sujet de la surcharge progressive ?
Certaines études de qualité ont été publiées à ce sujet, et peuvent aider les professionnels de la santé à comprendre comment la surcharge progressive peut être utilisée de manière optimale dans la rééducation et la gestion des blessures.
Quel est le bon dosage pour augmenter progressivement la contrainte pendant la rééducation ? En terme de pourcentage, de volume, ou d’intensité ?
Les études montrent que le dosage optimal de la surcharge progressive dépend de plusieurs facteurs, notamment le type d’exercice, la condition physique du patient, la gravité de la blessure, et les objectifs de la rééducation. Cependant, voici quelques exemples de dosage recommandés pour certains types d’exercices :
Exercices de résistance :
Selon l’étude de Wernbom et al. (2007), une augmentation de 2 à 10% de la charge de travail chaque semaine est efficace pour augmenter la force musculaire et la taille des muscles.
Exercices de musculation :
Selon l’étude de Fisher et al. (2009), une augmentation de 5 à 10% de la charge de travail chaque semaine est efficace pour augmenter la force musculaire et prévenir les blessures.
Exercices de proprioception :
Selon l’étude de Machado et al. (2016), une augmentation progressive de la difficulté des exercices de proprioception est efficace pour améliorer l’équilibre et prévenir les chutes chez les personnes âgées.
Exercices d’étirement :
Selon l’étude de Wilk et al. (1996), l’intensité des exercices d’étirement doit être augmentée progressivement pour éviter les blessures et améliorer la flexibilité.
Il est important de noter que ces dosages ne sont que des recommandations générales et que chaque patient doit être évalué individuellement pour déterminer le meilleur plan de traitement pour sa condition. Les professionnels de la santé peuvent ajuster le dosage en fonction des progrès du patient et de sa tolérance à l’exercice.
Qu’entend-on par « charge de travail » ?
Lorsque l’on parle de « charge de travail », nous faisons référence à la quantité de travail que le patient doit effectuer lors de ses exercices. En kinésithérapie, la charge de travail est souvent déterminée en fonction de la quantité de poids, de répétitions, ou de temps que le patient doit effectuer pour chaque exercice.
Par exemple, si un patient effectue des exercices de musculation pour renforcer les muscles du haut du corps, la charge de travail peut être déterminée en fonction du poids des haltères, du nombre de répétitions et des séries, ainsi que du temps de repos entre les séries. En augmentant progressivement la charge de travail au fil du temps, le patient peut progresser dans sa rééducation et atteindre ses objectifs de façon efficace et en toute sécurité.
Il est important de noter que la charge de travail doit être individualisée pour chaque patient en fonction de son niveau de condition physique, de ses objectifs de rééducation, de ses limitations physiques, et de son seuil de tolérance à l’effort. Une augmentation trop rapide de la charge de travail peut causer des blessures, tandis qu’une augmentation trop lente peut ne pas être suffisamment stimulante pour permettre une progression adéquate. Les professionnels de la santé peuvent ajuster la charge de travail en fonction des besoins et de la tolérance du patient pour optimiser la rééducation.
Quels sont les chiffres clés pour optimiser la surcharge progressive lors d’une rééducation de 12 semaines par exemple ?
Il n’y a pas de chiffres clés universels pour optimiser la surcharge progressive lors d’une rééducation de 12 semaines, car cela dépend de plusieurs facteurs individuels tels que l’état de santé du patient, ses objectifs de rééducation et le type d’exercice.
Mais comme vous adorez avoir des chiffres clés, voici un exemple généraliste :
Pour les exercices de résistance et de musculation, une augmentation de la charge de travail de 2 à 10% par semaine peut être efficace pour augmenter la force musculaire et la taille des muscles.
Pour les exercices de proprioception, une augmentation progressive de la difficulté des exercices peut être efficace pour améliorer l’équilibre et la conscience du corps dans l’espace.
Pour les exercices d’étirement, l’intensité doit être augmentée progressivement pour éviter les blessures liées au sur-étirement et améliorer la flexibilité.
Il est important de noter que ces recommandations doivent être adaptées en fonction des besoins individuels du patient, de sa tolérance à l’exercice et des objectifs de rééducation. Les professionnels de la santé peuvent ajuster la surcharge progressive au fil du temps en fonction de la progression du patient et des objectifs de rééducation spécifiques.
Combien de séries et de répétitions peut-on conseiller pendant la première phase, puis pendant la dernière phase de rééducation ? Le patient peut-il avoir un peu mal pendant ces exercices ?
C’est une question que vous nous posez souvent.
Le nombre de séries et de répétitions conseillé pendant la première et la dernière phase de rééducation dépendra du type d’exercice, de la condition physique du patient, de ses objectifs de rééducation et de la tolérance à l’effort. Il n’y a donc pas de chiffres clés universels.
Cependant, il est généralement recommandé de commencer avec un nombre de séries et de répétitions plus faible au début de la rééducation, puis d’augmenter progressivement la charge de travail au fil du temps. Par exemple, pour les exercices de résistance, on pourrait commencer par une série de 8 à 12 répétitions avec une charge légère, puis augmenter le nombre de séries et la charge de travail au fil des semaines.
Pour les exercices d’étirement, on pourrait commencer par des étirements doux et maintenus pendant 10 à 30 secondes, puis augmenter progressivement l’intensité de l’étirement (pour le travail de mobilité pur et dur, il est important d’y associer un travail de renforcement musculaire et d’amélioration du contrôle moteur évidemment).
Il est important que le patient ne ressente pas de douleur excessive pendant les exercices. Un certain niveau de gêne ou d’inconfort peut être ressenti, en particulier lors de la première phase de rééducation, mais cela ne devrait pas être excessif ou douloureux. Si le patient ressent une douleur importante ou persistante, cela peut indiquer que la charge de travail est trop importante ou que l’exercice est mal exécuté. Dans ce cas, il est important de réévaluer la charge de travail et de modifier les exercices en conséquence pour éviter les blessures.
Est-ce réellement efficace ?
Que nous dit la science au sujet de la surcharge progressive, si on la compare à un programme ou on ne « surcharge » pas réellement les tissus progressivement ?
Par exemple, une étude publiée dans le Journal of Strength and Conditioning Research a comparé l’efficacité de la surcharge progressive avec un travail linéaire pour améliorer la force musculaire chez des personnes âgées. Les résultats ont montré que la surcharge progressive était plus efficace pour améliorer la force musculaire que le travail linéaire.
De même, une revue systématique publiée dans le Journal of Sports Sciences a analysé les effets de la surcharge progressive versus un travail linéaire sur la performance physique. Les résultats ont montré que la surcharge progressive était plus efficace pour améliorer la performance physique que le travail linéaire.
Enfin, une étude publiée dans le Journal of Orthopaedic and Sports Physical Therapy a comparé l’efficacité de la surcharge progressive avec un travail linéaire pour la rééducation des patients atteints de douleurs lombaires chroniques. Les résultats ont montré que la surcharge progressive était plus efficace pour améliorer la douleur et la fonction que le travail linéaire.
Est-ce efficace sur le court-terme, lorsqu’on modifie les charges pendant la séance ?
Il y a peu d’études à ce sujet, alors ne tirons pas de conclusions trop hâtives.
Si on rentre dans le détail d’une étude de qualité, on peut s’intéresser à celle de (Laursen, 2013). Les chercheurs ont examiné l’efficacité de la surcharge progressive en alternant les charges sur les séries successives par rapport à l’utilisation d’une même charge sur toutes les séries.
L’étude a recruté 10 hommes en bonne santé, qui ont effectué un programme d’entraînement de 4 semaines, composé de 4 séances d’entraînement par semaine. Chaque séance d’entraînement comprenait quatre séries de quatre répétitions de back-squats, avec une charge correspondant à 80% de leur répétition maximale (80% du 1RM).
Les participants ont été répartis de manière aléatoire en deux groupes : un groupe alternant les charges sur les séries successives (AL) et un groupe utilisant la même charge sur toutes les séries (SAME). Les deux groupes ont progressé en charge de 2,5% toutes les deux semaines.
Les résultats ont montré que le groupe AL avait une augmentation significativement plus importante de la force sur le squat par rapport au groupe SAME. Les chercheurs ont conclu que l’alternance des charges sur les séries successives est une stratégie efficace pour optimiser la surcharge progressive et améliorer la puissance musculaire lors de l’entraînement de force.
Il est important de noter que cette étude n’a été menée que sur un petit échantillon de sujets et que les résultats ne peuvent pas être généralisés à l’ensemble de la population. Cependant, cette étude suggère que la surcharge progressive peut être optimisée en alternant les charges sur les séries successives, ce qui peut être une stratégie intéressante à considérer lors de la planification de programmes d’entraînement ou de rééducation en kinésithérapie.
Toutes ces études confirment que la surcharge progressive est une stratégie efficace pour améliorer la force musculaire, la performance physique et la rééducation en kinésithérapie, et qu’elle est supérieure à un travail linéaire sans progressivité.
Conclusion
En conclusion, la surcharge progressive est une stratégie essentielle pour optimiser les résultats d’un programme de rééducation en kinésithérapie. Les études scientifiques ont démontré l’efficacité de cette méthode pour améliorer la force musculaire, la fonction physique et la qualité de vie des patients. En utilisant des charges, des répétitions et des séries appropriées, ainsi qu’une progression adéquate au fil du temps, les kinésithérapeutes peuvent aider leurs patients à atteindre leurs objectifs de rééducation de manière efficace et sécuritaire. En gardant ces principes à l’esprit, il est possible de créer des programmes de rééducation sur mesure qui favorisent une récupération optimale pour les patients.
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Bilbiographie
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