Introduction
Salut mon petit pote !
Des gros biscottos avec les veines qui ressortent, genre Vin Diesel (en un peu moins bourrin).
Sans vraiment l‘avouer, tu rêves secrètement de ressembler à ce mec sur la photo.
Mais soulever de la fonte, très peu pour toi.
Et puis, tu as entendu parler de ce truc miracle qu’il suffit de serrer comme pour faire un garrot pour te permettre de gagner en muscle sans pousser 100 kils au développé couché.
KFC ?
Non.
KFR ?
Toujours pas, mais tu chauffes.
BFR, voilà !
Oui, c’est à peu près comme ça que tu l’as découvert. Depuis, tout le monde en parle… mais peu l’utilise, bizarrement.
Pourquoi ? Parce que c’est une méthode encore méconnue, bien sûr, mais aussi parce que certains ne voient pas l’intérêt pour leurs patients.
Pourquoi renforcer les patients ?
Bah ouais : pourquoi leur faire gagner du muscle, au juste ?
“Du renforcement, ok. Mais Mme Michu, elle s’en bat les rouleaux d’avoir les abdos de Cristiano Ronaldo ! La gonflette, c’est pour les trompettes qui font bronzette.”
En plus de rimes médiocres et de gros a priori, ces phrases qu’on peut entendre ici ou là sont dénuées de sens.
Parce qu’avoir des muscles, ça sert à tout le monde et à tout âge. Mais admettons, le temps de l’article, que la force musculaire ne soit pas l’objectif de la plupart de nos rééducations (oui, ça pique les yeux et j’ai autant de mal à l’écrire que toi à le lire).
Intéressons-nous à ce que tes patients cherchent avant tout, donc : ne plus avoir mal, bien sûr, mais aussi (et surtout ?) être mieux dans leur vie !
En Janvier 2023, une revue de littérature s’est penchée sur le sujet : est-ce que le BFR évoqué plus haut a un impact sur la douleur, la fonction et la qualité de vie de nos patients ?
Que dit la littérature (récente) au sujet du blood flow restriction ?
Le BFR et le muscle
Et d’abord, que signifie cet énième acronyme qui ressemble au nom d’un boys band des années 90 (Filip des 2Be3, si tu me lis du ciel, c’est pour toi) ? BFR, pour Blood Flow Restriction. Ou Restriction du flux sanguin, dans la langue de Molière (Jean-Bapt’, si tu me lis aussi…).
Pour faire simple, tu fais travailler ton patient en restreignant son apport sanguin grâce à des manchons spécialement concoctés pour l’occaz. Cette limitation sanguine crée un stress métabolique important, les muscles sont en ischémie et en hypoxie et déclenchent alors toute une cascade de réactions en chaîne afin de s’adapter à cet environnement.
Conséquence : le muscle de ton patient fatigue beaucoup plus vite, et s’adapte beaucoup plus fort.
Les résultats sur le gain de force et l’hypertrophie sont quasiment équivalents (bien qu’inférieurs, faut pas déconner non plus) à une séance de renforcement à charge lourde.
Le BFR et la fonction
Bon, ok pour les gros muscles. Et le reste, alors ?
Pour répondre, direction la science, comme d’hab’.
Le papier de Reina-Ruiz et al. (2023) recueille 14 études, pour une bagatelle de 533 patients.
Chose vraiment intéressante, ils ont concocté un panel qui représente plutôt bien les différentes pathologies que tu peux retrouver dans ton cabinet (que tu sois kiné du sport ou pas, d’ailleurs). On trouve de l’ortho-traumato comme des reconstructions du ligament croisé antérieur, des syndromes fémoro-patellaires …
Mais aussi de la rhumatologie comme des arthrites rhumatoïdes, des arthroses de genou et de hanche ou encore des troubles neurologiques tels que des scléroses en plaques.
L’âge des patients va de 14 à 75 ans, c’est dire si le casting est plus varié que pour un blockbuster américain !
Les gars ont posé des bandes occlusives sur tous ces acteurs, et les effets en termes de fonctionnalité, de qualité de vie ou de douleur ont été mesurés. Grâce notamment à des questionnaires, pour les deux derniers facteurs pris en compte. Simples, valides et efficaces.
La fonctionnalité a été définie comme la capacité du patient à se déplacer en sécurité et de manière indépendante, ou encore d’effectuer les tâches de sa vie quotidienne en autonomie. Faire sa life, quoi (pas celle de Chuck Norris, hein).
Pour mesurer cela, des tests physiques très simples et transférables à la vie de tous les jours ont été proposés (pas celle de James Bond, hein) : “Time Up and Go Test”, “Sit and Stand 5 times”, “Four Square Step Test”… Si tu ne sais pas de quoi on parle (comme moi), fais vite un copier-coller sur YouTube (comme moi).
Pour l’endurance et les capacités aérobiques, les patients ont effectué des tests de marche comme le plus grand périmètre en 6 minutes ou le temps sur 400m. Bref, des tests à mettre facilement en place au cabinet et qui permettent d’avoir un aperçu de leurs capacités en toute simplicité.
Ce qu’on peut tirer des résultats, c’est qu’un programme d’exercices de renforcement fonctionne très bien pour ces pathologies. Première nouvelle ! Mais ce programme fonctionne encore mieux avec le BFR.
BOUM, c’est dit.
Et oui, le travail sous BFR apporte des résultats à minima équivalents sinon supérieurs à ceux des exercices classiques.
La raison est simple : pour progresser, gagner en autonomie, en fonctionnalité et donc en qualité de vie, il faut des muscles plus forts. « Il faut donc travailler les muscles ! ». Bien vu, les petits génies, mais comment fait-on lorsque le patient a mal lors du renforcement ?
C’est là que le BFR intervient : un travail sous restriction sanguine à 30% de sa 1RM est suffisant pour créer une adaptation musculaire. Donc pas la peine de charger comme une mule.
Mieux : la plupart des activités de la vie quotidienne entraînent un stress métabolique, et c’est précisément le stress induit par le BFR.
Encore ? L’autonomie dépend des qualités musculaires, mais aussi des capacités en aérobie : pas de problème, tu peux très bien travailler l’aérobie sous restriction en faisant de l’intermittent 1min/1min sur vélo par exemple.
Le BFR et la douleur
Allez, le coup de grâce qui abrègera les souffrances des derniers sceptiques : le BFR produit un mécanisme d’hypoalgie pendant et après l’exercice, le seuil de douleur est donc augmenté, ton patient peut faire plus d’exercices et donc progresser encore plus. Échec et mat.
Conclusion sur le BFR
La messe est dite, le BFR est assurément un adjuvant très utile pour gérer tes patients.
Que ce soit ceux/celles qui se sont faits les croisés comme pour ceux/celles qui galèrent avec une maladie auto-immune ou neurologique.
Cependant, ce n’est pas un produit magique (même si j’avoue j’ai failli l’écrire) : le BFR ne change rien à ton programme de rééducation. Les exercices sont les mêmes, la progressivité est identique.
D’ailleurs, il n’y a pas de différence à moyen et long terme avec les programmes d’exercice sans BFR. Le BFR permet simplement de stimuler plus rapidement et plus précocement tes patients quand ils ne peuvent pas supporter la charge, en début de rééducation par exemple.
Et c’est quand même super cool de pouvoir diminuer leur douleur ou augmenter leur qualité de vie juste en posant un manchon, non ?
En plus, une fois le cabinet fermé, tu pourras enfin te faire les biceps dont tu rêves depuis si longtemps. Jason Statham n’a qu’à bien se tenir…
Allez, a tato !
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