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Instabilité gléno-humérale antérieure : opération ou kinésithérapie ?

Il y a bien longtemps, dans une galaxie lointaine, très lointaine, du nom de « kinésithérapie », l’instabilité gléno-humérale antérieure brillait telle une étoile de la mort conçue par l’Empire.

Bon, ça part direct en cacahuète cet article, reconcentrons-nous !

Tu as bien compris qu’aujourd’hui nous allons parler de l’instabilité antérieure d’épaule, et pas de Star Wars !

Des luxations énigmatiques qu’on a du mal à comprendre parfois, en passant par la bonne vieille subluxation chronique, les patients naviguent parfois dans l’inconnu, cherchant des réponses que nous avons du mal à leur donner, dans le vaste univers de la kinésithérapie.

Si tu as capté les références à l’univers de George Lucas, c’est que tu es prêt à embarquer avec moi ensemble dans ce voyage stellaire pour explorer et disséquer chaque aspect de cette pathologie complexe qu’est l’instabilité d’épaule, illuminant chaque recoin sombre par la lumière de la science et grâce à ma propre expérience clinique.

C’est quoi l’instabilité gléno-humérale antérieure ?

Même si elle parait, de prime abord, simple à comprendre, l’instabilité gléno-humérale antérieure se présente comme un véritable casse-tête.

Cette sous-catégorie d’épaule instable se caractérise par une incapacité à maintenir la tête de l’humérus stable et plaquée sur la glène de la scapula, provoquant une instabilité (pas compliqué à comprendre hein) allant de la micro-instabilité à la luxation (perte de contact total entre les deux surfaces osseuses), en passant par la subluxation.

Cette problématique prend racine dans diverses causes, incluant des traumatismes, des anomalies anatomiques ou des stress répétitifs (souvent chez les lanceurs ou les combattants d’ailleurs), menant souvent à un cercle vicieux d’instabilité et au fur et à mesure… à de la douleur.

Il existe différents types d’instabilité gléno-humérale.

L’instabilité traumatique :

Généralement causée par une blessure ou un traumatisme, c’est souvent une vraie luxation de l’épaule (qui nécessite d’être remise par un médecin).

L’instabilité atraumatique :

Elle ne résulte pas d’une blessure directe. Elle peut donc être liée à une laxité ligamentaire générale ou à une faiblesse musculaire, mais en réalité c’est plus souvent un manque de contrôle neuromoteur (on parlera des facteurs de risque dans quelques secondes, ne sors pas ton sabre laser pour me découper tout de suite).

Les symptômes de l’instabilité gléno-humérale antérieure :

– Parfois de la douleur

– Surtout une sensation d’instabilité ou de « lâcher » de l’épaule

– En fonction de la problématique, on retrouve parfois une limitation à utiliser l’épaule, surtout pour des mouvements qui nécessitent beaucoup de force, ou des mouvements au-dessus de la tête (en overhead pour les kainrys).

Luxation ou subluxation répétée (instabilité quoi…)

Comment se pose le diagnostic de l’instabilité gléno-humérale antérieure ?

Comme tout bon kinésithérapeute, on commencera par une anamnèse bien menée… et là c’est souvent rapide : ton patient va te dire « je me suis luxé l’épaule ».

Ou alors : « je sens mon épaule instable ».

Tu vois le délire ?

Comme d’habitude : ÉCOUTONS NOS PATIENTS !

Ensuite, on se lancera sur le Dagoba du bilan : l’examen clinique.

Évaluation de la mobilité de l’épaule, tests spécifiques pour évaluer l’instabilité gléno-humérale (tests d’appréhension, de relocation et release test), et pourquoi pas les tests pour évaluer les signes d’hyperlaxité (on en parle dans la formation sur l’épaule que tu peux regarder ici : https://school.training-therapie.fr/optimiser-la-reeducation-de-l-epaule).

Et les imageries médicales là-dedans ?

On a besoin de R2D2 quand même !

Radiographies, IRM ou arthroscanner peuvent être utilisés pour visualiser l’articulation et les structures environnantes (et évaluer les dégâts liés à la potentielle luxation, pour voir si l’opération est une bonne idée… ou pas).

Cela nous amène donc logiquement aux facteurs de risque de récidive...

Facteurs de risque de récidive de l’instabilité gléno-humérale antérieure

L’instabilité gléno-humérale antérieure est souvent accompagnée de récidives, surtout chez certains groupes de patients ou en présence de certains facteurs de risque.

En naviguant dans la galaxie PubMed, on peut identifier des éléments clés en lien avec les risques d’instabilité, tels que la jeunesse, la participation à des sports de contact et l’hyperlaxité ligamentaire.

Âge au moment de la première luxation :

Les jeunes patients, surtout ceux de moins de 20 ans, ont un risque plus élevé de récidive de luxation de l’épaule (Owens, 2009).

Genre :

Les hommes sont généralement plus susceptibles d’expérimenter des récidives d’instabilité gléno-humérale antérieure que les femmes (Zacchilli, 2010).

Sport pratiqué :

Les athlètes, surtout ceux qui pratiquent des sports de contact ou des sports qui nécessitent des mouvements de l’épaule répétés et extrêmes (surtout en overhead), ont un risque plus élevé de récidives (Olds, 2015).

Atteinte osseuse associée :

Les lésions de la cavité glénoïde (lésion de Bankart) ou les lésions du bord postérolatéral de la tête humérale (lésion de Hill-Sachs) augmentent le risque de récidive de l’instabilité (Burkhart, 2000).

Hyperlaxité :

Les patients ayant une hyperlaxité ligamentaire ou une laxité capsulaire exagérée ont également un risque plus élevé de récidive de l’instabilité gléno-humérale (Balg, 2007).

Les facteurs de risque de récidive de l’instabilité gléno-humérale antérieure sont nombreux et multifactoriels. Une évaluation complète des patients peut aider à orienter le traitement et à minimiser le risque de récidive de l’instabilité (ou du moins, à savoir qu’il y a des risques élevés).

Et savoir si le patient devrait se faire opérer, ou pas !

Mais d’ailleurs, est-ce que tu connais les traitements chirurgicaux « classiques » pour l’instabilité gléno-humérale antérieure ?

Les opérations pour l’instabilité antérieure

Parmi les étoiles de l’Empire chirurgical, la chirurgie de Bankart et la procédure de Latarjet brillent particulièrement.

Chacune avec ses avantages et inconvénients. Elles offrent des options variées adaptées à la singularité de chaque patient en fonction de la maitrise de chaque technique par le chirurgien (et c’est ça le plus important en réalité).

Réparation de Bankart :

Le chirurgien va suturer et réparer les lésions du labrum antérieur, de la capsule et des ligaments gléno-huméraux antérieurs (Castagna, 2010).

Cette opération peut être réalisée sous arthroscopie ou à ciel ouvert.

En réalité, on utilise cette chirurgie lorsqu’il y a peu d’atteinte osseuse, et que les risques de récidives sont faibles (donc plutôt pour les femmes qui ne pratiquent pas de sport de contact par exemple, sans exagération « sexiste »… #quelaforcesoitavecRey).

Butée osseuse (Latarjet-Bristow) :

Chirurgie un peu plus « costaud », le but est de transférer le processus coracoïde sur la face antérieure de la glène.

La chirurgie à ciel ouvert est plus utilisée en Europe, mais nos amis les Américains utilisent plus l’arthroscopie pour cette opération (et leurs résultats semblent légèrement moins bons).

On l’utilise surtout si l’instabilité antérieure est associée à une perte osseuse glénoïdienne significative, ou lorsque les contraintes sur l’épaule dans la vie de tous les jours et la pratique sportive sont élevées (Young, 2011).

Réparation de Remplissage de Hill-Sachs :

Le but est de combler une lésion de Hill-Sachs, sous arthroscopie la plupart du temps.

Les chirurgiens l’utilisent évidemment plutôt pour des lésions de Hill-Sachs sans déficit osseux glénoïdien significatif (Purchase, 2008).

Quelle est l’opération la plus efficace ?

Faisons le point sur les avantages et les inconvénients de chaque opération (même si encore une fois, le choix s’oriente souvent sur la thérapie que le chirurgien maitrise le mieux).

Réparation de Bankart sous arthroscopie :

Avantages : moins invasive, moins de complications.

Inconvénients : taux de récidive plus élevé chez les patients avec une perte osseuse significative.

Procédure de Latarjet :

  • Avantages : excellents résultats pour les patients avec une perte osseuse significative ou une hyperlaxité.
  • Inconvénients : technique chirurgicale plus invasive avec un potentiel de complications plus élevé.

Selon (Bessière, 2014), la procédure de Latarjet offrirait une meilleure stabilité que la réparation de Bankart arthroscopique.

Les résultats de (Zhu, 2015) sont similaires, avec moins de « complications post-chirurgie » pour les chirurgies de Bankart.

Selon (Shaha, 2015), il serait important de considérer même une petite perte osseuse comme un facteur de risque pour l’échec de la réparation de Bankart, suggérant que d’autres interventions, comme celle de Latarjet, pourraient être plus appropriées dans ces cas.

Dans la quête de l’opération la plus efficace, les yeux se tournent donc le plus souvent vers la procédure de Latarjet. Cette méthode présente des taux de succès plus élevés, non seulement en termes de stabilisation de l’épaule, mais également concernant la reprise des activités sportives, permettant aux patients de retrouver les terrains plus « rapidement » (Bessière, 2014 ; Zhu, 2015 ; Shaha, 2015).

Il est essentiel d’évaluer soigneusement chaque patient pour déterminer la meilleure approche chirurgicale en fonction de l’anatomie, des lésions, de la fonction, de l’activité, et des attentes du patient.

Une discussion approfondie avec le chirurgien orthopédique permettra de planifier une intervention chirurgicale adaptée pour optimiser les résultats et minimiser les risques de récidive de l’instabilité.

Bon, on a capté que les opérations étaient pertinentes.

Mais, que valent-elles face à notre superbe métier qu’est la kinésithérapie ?

Rééducation ou opération ?

Les étoiles de la rééducation et de la chirurgie brillent d’une lumière différente dans le ciel…

Des études révèlent une équivalence surprenante entre les deux types de prise en charge, en particulier en ce qui concerne le retour à la fonction et la satisfaction du patient à court et moyen terme, mettant la lumière sur le chemin alternatif qu’est la rééducation pour ceux hésitant à passer sous le bistouri.

Quand renvoyer le patient pour un avis chirurgical ?

Comme les étoiles guident les Jedis, les kinésithérapeutes orientent le voyage thérapeutique de leurs patients. Est-ce que je vais trop loin avec mes métaphores ? Pas sur.

Il est essentiel d’évaluer minutieusement la réponse du patient à la rééducation, l’ampleur de l’instabilité et la présence de lésions associées.

En présence d’une instabilité persistante malgré une rééducation complète et consciencieuse, l’étoile du chirurgien s’allume, guidant le patient vers une nouvelle trajectoire de guérison.

Il existe des études comparatives sur la rééducation (kinésithérapie) et la chirurgie pour l’instabilité gléno-humérale antérieure. Les résultats varient en fonction des caractéristiques des patients et de la gravité de l’instabilité.

Selon (Kirkley, 2005), la chirurgie de Bankart arthroscopique immédiatement après la luxation était supérieure à la rééducation et à l’immobilisation dans les luxations antérieures aiguës de l’épaule chez les jeunes adultes actifs.

Selon (Bottoni, 2002), les patients opérés auraient de meilleurs résultats sur les récidives et sur le taux de retour au sport.

Selon (Handoll, 2004), cette revue de la Cochrane a trouvé des preuves limitées suggérant que la chirurgie pourrait réduire le risque de récidive de la luxation, mais les données sur la qualité de vie et la fonction à long terme étaient limitées.

Donc, à court terme : la chirurgie peut offrir une meilleure stabilité et un retour plus rapide aux activités, mais avec le risque et le coût associés à toute intervention chirurgicale (ce n’est pas anodin).

Sur le moyen et le long terme… les résultats dépendent de nombreux facteurs, notamment de la rééducation postopératoire et de l’adhésion du patient au programme de rééducation.

La rééducation seule peut être bénéfique pour les patients présentant une instabilité moins grave ou ceux qui ne sont pas de bons candidats pour la chirurgie.

Chaque cas d’instabilité gléno-humérale antérieure est unique et la décision entre la chirurgie et la rééducation doit être individualisée.

Une discussion approfondie entre le patient, le chirurgien orthopédique, et le kinésithérapeute est cruciale pour déterminer la meilleure voie thérapeutique.

Si après un programme de rééducation complet et bien conduit (pas une rééducation à base d’ultrasons et d’électrostimulation…), le patient continue de ressentir une instabilité, une douleur ou une limitation fonctionnelle, une consultation chirurgicale est recommandée.

Des épisodes répétés d’instabilité, en particulier des luxations ou subluxations fréquentes malgré la rééducation, sont un signal d’alerte, et nécessitent un avis chirurgical (ou au moins une évaluation poussée en imagerie).

L’incapacité du patient à reprendre ses activités habituelles (notamment sportives) en raison de l’instabilité de l’épaule, même après une période raisonnable de rééducation, justifie aussi un avis chirurgical.

Un signe radiologique de perte osseuse importante, qui peut être un facteur de récidive d’instabilité, doit inciter à rechercher un avis chirurgical (l’IRM ou le scanner peuvent aider à évaluer les lésions osseuses).

Un échec de la rééducation (avec un objectif d’améliorer la force, la stabilité et la fonction de l’épaule) peut indiquer la nécessité d’une intervention chirurgicale.

Les patients jeunes et actifs, en particulier ceux qui pratiquent des sports de contact, peuvent être de meilleurs candidats pour une stabilisation chirurgicale précoce.

Et pour terminer, l’appréhension est très importante à évaluer. C’est LE signe qui semble le plus prometteur dans le futur…

Conclusion

En tant que kinésithérapeute, il est essentiel de réaliser un bon bilan avec le patient lors de la première séance, puis de le re-évaluer de manière régulière.

La décision d’orienter le patient vers un avis chirurgical doit être basée sur une évaluation complète de la réponse du patient à la rééducation, ainsi que sur une évaluation clinique et des imageries plus approfondies.

L’opération n’est pas obligatoire (pas obligé de finir avec un exosquelette comme Luc ou Anakin).

Une discussion collégiale avec les autres professionnels de santé impliqués dans la rééducation du patient est toujours très bénéfique.

Fais toi confiance, en tant que thérapeute… lorsque tu prends en charge des patients instables : la force sera toujours avec toi.

Bibliographie

Owens BD, Dawson L, Burks R, Cameron KL. Incidence of shoulder dislocation in the United States military: demographic considerations from a high-risk population. J Bone Joint Surg Am. 2009;91(4):791-796.

Zacchilli MA, Owens BD. Epidemiology of shoulder dislocations presenting to emergency departments in the United States. J Bone Joint Surg Am. 2010;92(3):542-549.

Olds M, Ellis R, Donaldson K, Parmar P, Kersten P. Risk factors which predispose first-time traumatic anterior shoulder dislocations to recurrent instability in adults: a systematic review and meta-analysis. Br J Sports Med. 2015;49(14):913-922.

Burkhart SS, De Beer JF. Traumatic glenohumeral bone defects and their relationship to failure of arthroscopic Bankart repairs: significance of the inverted-pear glenoid and the humeral engaging Hill-Sachs lesion. Arthroscopy. 2000;16(7):677-694.

Balg F, Boileau P. The Instability Severity Index Score. A simple pre-operative score to select patients for arthroscopic or open shoulder stabilisation. J Bone Joint Surg Br. 2007;89(11):1470-1477.

Castagna A, Markopoulos N, Conti M, Delle Rose G, Papadakou E, Garofalo R. Arthroscopic Bankart suture-anchor repair: radiological and clinical outcome at minimum 10 years of follow-up. Am J Sports Med. 2010;38(10):2012-2016.

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Purchase RJ, Wolf EM, Hobgood ER, Pollock ME, Smalley CC. Hill-sachs « remplissage »: an arthroscopic solution for the engaging hill-sachs lesion. Arthroscopy. 2008;24(6):723-726.

Bessière C, Trojani C, Carles M, Mehta SS, Boileau P. The open latarjet procedure is more reliable in terms of shoulder stability than arthroscopic bankart repair. Clin Orthop Relat Res. 2014 Aug;472(8):2345-51. doi: 10.1007/s11999-014-3550-9. PMID: 24615422; PMCID: PMC4079884.

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Shaha JS, Cook JB, Song DJ, Rowles DJ, Bottoni CR, Shaha SH, Tokish JM. Redefining « Critical » Bone Loss in Shoulder Instability: Functional Outcomes Worsen With « Subcritical » Bone Loss. Am J Sports Med. 2015 Jul;43(7):1719-25. doi: 10.1177/0363546515578250. Epub 2015 Apr 16. PMID: 25883168.

Kirkley A, Werstine R, Ratjek A, Griffin S. Prospective randomized clinical trial comparing the effectiveness of immediate arthroscopic stabilization versus immobilization and rehabilitation in first traumatic anterior dislocations of the shoulder: long-term evaluation. Arthroscopy. 2005 Jan;21(1):55-63. doi: 10.1016/j.arthro.2004.09.018. PMID: 15650667.

Bottoni CR, Wilckens JH, DeBerardino TM, D’Alleyrand JC, Rooney RC, Harpstrite JK, Arciero RA. A prospective, randomized evaluation of arthroscopic stabilization versus nonoperative treatment in patients with acute, traumatic, first-time shoulder dislocations. Am J Sports Med. 2002 Jul-Aug;30(4):576-80. doi: 10.1177/03635465020300041801. PMID: 12130413.

Handoll HH, Almaiyah MA, Rangan A. Surgical versus non-surgical treatment for acute anterior shoulder dislocation. Cochrane Database Syst Rev. 2004;2004(1):CD004325. doi: 10.1002/14651858.CD004325.pub2. PMID: 14974064; PMCID: PMC8805122.

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